PROCES VERBAL
Lan mil huit cent quatre vingt neuf et le vingt sept février ;
Nous, Joseph dOrnano, commissaire central de Police de la ville
dArles, officier de la police judiciaire, auxiliaire de M. le Procureur
de la République ;
Vu la pétition ci-jointe des habitants de la place de Lamartine,
relative aux agissements du Né Vincent van Goghe sujet hollandaise,
atteinte daliénation mentale ;
Vu le rapport ci-annexé de Monsieur le Docteur Delon en date du
7 de ce mois et les ordres de Monsieur le Maire dArles, prescrivant
détablir le degré de folie de Van- Goghe ;
Avons procédé à une enquête et entendu les
ci-après dénommés :
Enquête
1. Le sieur Soulé Bernard, âgé de 63 ans, Propriétaire
demeurant Avenue Montmajour 53,qui nous a fait la déclaration suivant :
En ma qualité de gérant de la maison habitée par
le Sieur Vincent Van Goghe, jai eu loccasion de mentretenir
hier avec lui et constater quil est atteint daliénation
mentale, car sa conversation est incohérente et sa raison égarée.
Dautre part, jai ouï-dire que cet homme se livre à
des attouchements sur les femmes qui habitent dans le voisinage ;
il ma été de même assuré quelles
ne sont même plus tranquilles chez elles, car il sintroduit
dans leurs domiciles. Enfin, il est urgent que cet aliéné
soit séquestré dans un asile spécial ; étant
donné surtout que la présence de Van Goghe dans notre quartier
compromet la sécurité publique. Lecture faite, persiste
et signe Le Cre central (suivent la signature de ce dernier et du témoin
en question).
2. La Née Marguerite Favier, fe Crevoulin, âgée de
32 ans, Mde de comestibles demeurant Place de Lamartine, qui nous a dit
ce qui suit : Jhabite la même maison que le Né
Vincent Van Goghe qui est réellement aliéné. Cet
individu sintroduit dans mon magasin et sy impose. Il insulte
mes clients et se livre à des attouchements sur les femmes du voisinage
quil poursuit jusque dans leurs domiciles. Enfin tout le monde est
effrayé dans le quartier en raison de la présence du susdit
Van Goghe, qui deviendra certainement dangereux pour la sécurité
publique. Lecture fait, persiste et signe avec nous Le Cre central (suivent
la signature de ce dernier et celle de la femme en question).
3. La Née Maria Ourtoul, fe Viany, âgée de 40 ans,
débitante de tabac demeurant Place de Lamartine qui a confirmé
la déclaration du précédent témoin. Et lecture
faite persiste et signe. Le Cre central
Maria Ourtoul Ornano
4. La Née Jeanne Corréas, fe Coulomb, âgée
de 42 ans, couturière, demeurant Place de Lamartine 24 qui a fait
la déclaration suivante :
Le Sieur Van Goghe qui habite le même quartier que moi devient de
plus en plus fou depuis quelques jours ; aussi dans le voisinage
tout le monde est effrayé. Les femmes surtout ne sont plus rassurées
car il se livre sur elle à des attouchements et tient des propos
obscènes en leur présence. En ce qui me concerne, jai
été saisie par la taille devant le magasin de Me. B par
cet individu avant-hier, lundi, et soulevée en lair. Enfin
cet aliéné devient dangereux pour la sécurité
publique et tout le monde réclame sa séquestration dans
un établissement spécial. Lecture faite persiste et signe.
5. Le sieur Ginoux Joseph, âgé de 45 ans, limonadier demeurant
Place de Lamartine qui a reconnu que les faits exposés par le précédent
témoin sont vrais et sincères et déclare navoir
rien à ajouter à sa déposition. Et lecture faite
persiste et signe.
Constatations
Le Né Vincent Van Goghe est réellement atteint daliénation
mentale ; cependant nous avons constate à différentes
reprises que cet aliéné a des moments de lucidité.
Van Goghe nest pas encore dangereux pour la sécurité
publique, mais on craint quil ne le devienne. Tous ses voisins sont
effrayés et à juste titre, car il y a quelques semaines
laliéné dont sagit sest coupé une
oreille dans un accès de folie ; crise qui pourrait se produire
à nouveau et être funeste à quelque personne de son
voisinage.
Le Cre Central
Ornano
Conclusion
Attendu que de lenquête qui précède et de nos
constatations personnelles, il résulte que le Né Vincent
Van Goghe est atteinte daliénation mentale et quil
pourrait devenir dangereux pour la sécurité publique ;
sommes davis quil y a lieu de séquestrer cet aliéné
dans un asile spécial.
Le Cre Central
Ornano
De tout quoi nous avons dressé le présent procès-verbal
pour être transmis aux fins de droit et avons signé;
À Arles le trois mars mil huit cent quatre-vingt neuf.
Le Cre Central
Ornano
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